Techniques et Conservations des Œuvres d'Art



Aucune restauration ne doit être entreprise sans une étude minutieuse de l'état matériel et esthétique de l'oeuvre. Cette étude sera faite à la loupe binoculaire avec des analyses de laboratoire. A l'aide de tous ces éléments, des essais limités (appelés fenêtres) sont faits sur des plages significatives, permettant de poser un diagnostic précis. Les photographies en cours de restauration et les différents "rapports" constituent le dossier "médical" du tableau.


LE SUPPORT, LA COUCHE PICTURALE, LES VERNIS.


LE SUPPORT


Le bois a été le support essentiel et ce, jusqu'à la Renaissance. Des "portraits" de momies égyptiennes étaient peintes en bois entre le 1er et le IV siècle sous l'aspect d'icônes.


La bonne conservation des panneaux est fonction de l'essence: Bois dur chêne, hêtre etc. Bois tendre: pin, peuplier, tilleul etc. Le jeu du bois, en fonction de ces éléments, peut être très important. Il cause des courbures, gauchissement; bossellement, des fentes, et un désassemblage des panneaux.


La restauration consistera à rassembler les planches, réduire les fentes et les bossellements et à faire des retouches appropriées après masticage spécial des lacunes. Les parties tendres d'aubier et les zones de collages sont traitées systématiquement contre les "capricornes" et les "lyctus" par des désinfections gazeuses suivies de consolidation par imprégnation.


La toile : son utilisation a débuté avant 1500, et l'épanouissement de son utilisation se situe au XVII et XVIII siècles. Les peintres vénitiens du XVI utilisèrent des toiles de lin épaisses à chevrons afin d'accrocher la couche picturale. Au XVII siècle en Italie, les toiles de chanvre lâches devinrent de plus en plus serrées et ce, jusqu'au XVIII et XIX grâce à une nouvelle technologie de tissage.


Le textile et l'encollage forment un ensemble hygroscopique, tandis que la base et la couleur forment une masse peu élastique d'où vient le déséquilibre des réactions entre le revers et la face du tableau. La dilatation et la contraction provoquent des craquelures dites de "vieillissement". La mesure préventive la plus importante est d'éviter les écarts de température qui favorisent les attaques biologiques et multiplient les cassures. L'humidité doit se situer environ à 50% , et la température à 18° environ. Les écarts hygrométriques, la pollution de l'air et le rayonnement ultraviolet sont des facteurs qui accélèrent le vieillissement de l'oeuvre.


Parmi les interventions capitales que peuvent subir les tableaux, notons le rentoilage :


Cela consiste à doubler la toile originale d'une nouvelle toile à l'aide de différentes cires ou résines (méthode hollandaise) ou de certaines résines synthétiques. Le spécialiste, compte tenu de la datation de la toile, déterminera le choix des produits afin de respecter les méthodes de restauration traditionnelles.


LA COUCHE PICTURALE


La préparation du support a un rôle essentiellement protecteur qui rend la toile apte à recevoir la couche de peinture. Cette préparation indispensable était épaisse au XIV et XV siècles sur les panneaux Italiens, et relativement minces au XVI et XVII siècles sur les panneaux flamands.


La couche de couleur est composée de pigments d'origine minérale, animale ou végétale, ainsi que de "liants" permettant une combinaison chimique parfaite.


Dès le XVIII siècle, et grâce aux progrès de la chimie, le nombre de pigments a augmenté considérablement. La datation d'un tableau , entre autre, se fait par l'analyse de ses pigments.


Les liants, sont à base de colle de peau, gomme arabique ou caséine, émulsions à l'oeuf (blanc ou jaune) etc. Il existe une grande variété de recettes que le restaurateur utilise en fonction de chaque oeuvre à restaurer. L'utilisation des liants huileux par les primitifs italiens a donné une transparence considérable à l'oeuvre. Le rajout des sécatifs a accéléré le séchage des huiles et soulagé les peintres des délais de séchage.


L'arrivée des liants synthétiques modernes (vinyliques, acryliques, glycérophtaliques) a donné aux peintres modernes la possibilité d'une liberté d'expression artistique permettant une fantaisie sans limite.


LES VERNIS


Le vernis final d'un tableau a un rôle optique. Il donne à la couleur son éclat maximal, et forme un écran aux poussières grasses et aux ultraviolets de la lumière. Les Vernis jaunissent avec le temps, en créant un assombrissement , ou en faisant apparaître du "chancis". (c'est une micro fissuration qui fait perdre au vernis sa transparence et favorise le dépôt d'une couche blanchâtre opaque). Les différentes interventions consisteront soit à éliminer ce vernis sans toucher toutefois à la couche picturale, soit à procéder à certains allégements afin de garder une certaine patine. Une étude minutieuse de la composition du vernis est analysée afin de déterminer les différents composants des produits à utiliser.


EPILOGUE


Le grand nombre d'opérations décrites - d'une manière succincte -, et leur difficulté ne doivent pas décourager les possesseurs de tableaux et les amoureux de la peinture. Une "consultation" gratuite auprès du restaurateur permettra de juger de l'opportunité de la dépense. Elle donnera la possibilité à l'amateur de tableaux d'art de préserver la vie de l'oeuvre qu'il possède, et d'en tirer des joies réellement sensibles et incommensurables.


Michel Ghanime


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