Histoire et tradition



La restauration est aussi ancienne que la création artistique. Au moyen âge, beaucoup de tableaux, à l'occasion de querelles théologiques, ont été remis au goût du jour par "piété", et beaucoup d'artistes retouchaient les oeuvres de leurs devanciers. Des artistes très célèbres agrandissaient ou diminuaient les tableaux existants, pour les adapter aux exigences des décors des palais; (la Primatrice restaurant les tableaux de Raphaël pour François 1er en est un exemple).


Pendant des siècles, le souci décoratif dominera, et le respect historique de la création artistique fut ignoré.


Ce n'est qu'au XVIII siècle, que la distinction apparaîtra entre le peintre et le restaurateur. Une prise de conscience s'est imposée et on a enfin compris qu'une oeuvre d'art, en tant que témoignage des époques qu'elle a pu traverser, impose qu'on lui laisse son aspect historique.


La restauration a pour but de prolonger la vie de l'oeuvre en ralentissant les différentes étapes de dégradations. Ces exigences ont généré le respect des trois lois fondamentales: La Lisibilité, la Stabilité, et la Réversibilité.


La Lisibilité: Elle impose la retouche (strictement limitée aux accidents) décelable par un laboratoire, ou de très près à l'oeil nu par un professionnel.


La Stabilité: C'est la préoccupation permanente des restaurateurs. Trouver les matériaux naturels de restauration qui ont fait leurs preuves, et juger avec discernement la fiabilité dans le temps des matériaux modernes et nouveaux.


La Réversibilité: Toute matière ajoutée doit pouvoir être enlevée sans risque pour la peinture originale. Ceci est vrai pour la retouche et non pas pour les dévernissages et allégements.


La restauration est le fruit d'une longue expérience et de recherches. Les produits sont constamment remis en cause en raison des progrès de la chimie. Toute oeuvre à restaurer constitue un cas d'espèce. Il n'est pas permis de donner des "recettes" de restauration comme certains manuels du XIX siècle, où on préconisait la "pomme de terre" coupée en deux pour le nettoyage. Ces pratiques font frémir par la gravité des conséquences et sourire par la bizarrerie des produits préconisés: "La salive est bonne pour les petits tableaux mais il faut se méfier de l'acide phosphorique qu'elle contient..." ou le "dévernissage à sec: on peut l'enlever en l'usant avec le doigt ou laver la peinture avec une bonne eau-de-vie..."


Les tableaux qui ont traversé tous ces avatars, ne peuvent que nous être précieux, car ces méthodes empiriques, ont dénaturé et ruiné des collections entières.


Il n'y a pas de place de nos jours aux "bricoleurs-bidouilleurs", car la restauration exige une discipline de rigueur, basée sur 3 principes fondamentaux de maîtrise:


. Une connaissance de la peinture et du dessin ainsi que l'histoire de l'Art,


. Une formation scientifique par la maîtrise de la chimie, physique, et des méthodes modernes d'examens optiques.


. Une pratique et une passion sans faille.


Michel Ghanime


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